dimanche 30 novembre 2014

La succession de Miloud Chaabi: partager le groupe entre ses enfants ne serait pas une bonne idée

"Ayant bâti sa fortune à la force du poignet, Miloud Chaabi, voyant sa santé décliner et les querelles se multiplier entre ses fils, a préféré prendre les devants. Décision sage d’un homme au grand cœur". Ainsi se termine un article du site "Le360.ma"(1) où il est question de partitionner le groupe Chaabi entre les enfants de l'entrepreneur.
J'aurais préféré lire "Ayant bâti sa fortune à la force du poignet et désireux de pérenniser son groupe, Miloud Chaabi a mis en place un schéma de propriété et de gouvernance destiné à le protéger des querelles de famille".
Avant de développer mon point de vue sur la préparation de la succession de Miloud Chaabi, je dois au lecteur de préciser que je ne connais pas l'homme et ne suis pas plus informé sur ses affaires. Je dois également reconnaître que je suis inspiré par un article de presse dont le contenu n'est pas forcément certain. Aussi, j'utiliserai le conditionnel et serais disposé à retirer mon propos s'il était mal fondé.
Si j'ai choisi de m'exprimer sur la base d'élèments incertains, c'est parce qu'il y a urgence et que je suis convaincu que le fractionnement du groupe Chaabi risque d'avoir des conséquences néfastes sur ses composantes et de constituer un mauvais exemple pour l'économie nationale. J'espère qu'il n'est pas trop tard pour envisager un autre scénario.
Au fil des décennies, Miloud Chaabi a bâti un groupe de taille respectable, à l'échelle nationale et africaine. Partager le groupe entre sa progéniture signifierait la disparition du groupe en tant que tel et sa réduction à une collection de PME. Hormi les enfants de M. Chaabi qui pourraient avoir l'impression de gagner, à court terme, qui d'autre gagnerait à une telle fragmentation?
L'économie nationale ne gagnerait pas à voir fondre un champion national qui a activement contribué au développement du pays et qui participe à la présence économique du Maroc sur le continent africain. L'économie marocaine a besoin, au contraire, d'une cohorte de champions nationaux capables de tenir le choc de la concurrence mondiale.
La succession du fondateur est toujours un moment de vérité pour la pérennité de l'oeuvre d'un entrepreneur. Les entrepreneurs qui ont le souci de perpétuer leur oeuvre ne cèdent pas à la facilité de la paix familiale. Au contraire, ils cherchent les moyens juridiques et organisationnels de minimiser les interférences négatives de la famille avec les nécessités de pérennisation et de dévelopement du 'business'.
Au delà de son propre cas, la manière dont Miloud Chaabi organise sa succession risque de constituer un exemple pour d'autres entrepreneurs marocains ayant eu des parcours similaires. Parce que son groupe occupe une place importante dans le pays, Miloud Chaabi ne doit pas perdre de vue la dimension nationale de sa création et devrait avoir le courage de la protéger de sa famille biologique.
L'économie marocaine aura accédé à un niveau supérieur de maturité lorsqu'elle sera composée d'un bon nombre d'entreprises familiales de grande taille qui auront survécu à leur fondateur et continué à prospérer. Certains groupes familiaux continueront à être dirigés par des membres de la famille. D'autres seront confiés à des dirigeants professionnels sous contrôle familial.
La recherche sur les entreprises familiales a mis en évidence deux cas de figure. Dans le premier, l'entreprise est subordonnée aux intérêts de la famille. Dans l'autre, la famille est subordonnée aux intérêts de l'entreprise. J'aimerais croire qu'il est encore possible à M. Chaabi de changer d'avis et de choisir le deuxième scénario. J'espère que ses enfants comprendront, aussi, qu'il va de leur intérêt patrimonial, à long terme, de posséder une partie d'un groupe conquérant au lieu de se retrouver à la tête d'une PME, aussi grosse et rentable soit-elle...aujourd'hui.
Pour conclure, je souhaite longue vie et formule mes voeux de santé à M. Chaabi. La discussion sur l'avenir de son groupe ne doit pas nous faire oublier que l'homme est toujours parmi nous, pour de longues années encore. C'est tout le mal que je peux lui souhaiter.

1) (http://www.le360.ma/fr/economie/miloud-chaabi-repartit-sa-fortune-entre-ses-enfants-24839)

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